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souvent de nuit, et faisoit lever leurs curés et prê­tres de la paroisse pour les mener en procession : comme ils firent en ces jours au Curé de Saint-Eus­tache (0, lequel, pensant leur faire quelque remon­trance, fut appellé politique et heretique, et enfin con­traint de les mener promener. Ce bon curé, avec deux ou trois autres de Paris, condamnoient avec raison ces processions nocturnes, hommes et femmes, gar­çons et filles, marchoient pesle mesle, et tout étoit de carême prenant : c'est assés dire qu'on en vit des fruits.
Ce bon religieux de chevalier d'Aumale, qui en fai­soit ses jours gras, s'y trouvoit ordinairement ; et meme aux grandes ruës et aux eglises jettoit au travers d'une sarbacanne des dragées musquées aux demoiselles par lui reconnues, ausquelles il donnoit ensuite des colla­tions, la Sainte Feuve (a) n'étoit oubliée, qui, seu­lement couverte d'une fine toille, et d'un point coupé à Ia gorge, se laissa une fois mener par-dessous le bras au travers de l'eglise de Saint-Jean, et muguetter et attoucher, au scandale de plusieurs qui alloient de bonne foy à ces processions.
Les prédicateurs en leurs sermons disoient mille injures du Roy. « Ce teigneux, disoit Boucher, est tou-* jours coëffé à la turque d'un turban, lequel on ne « lui a jamais vû ôter, même en communiant., pour « faire honneur à Jesus-Christ; et quand ce malheu-« reux hipocrite faisoit semblant d'aller contre, les reis-« tres, il avoit un habit d'Allemand fourré, et des cro-
(-) Curé de Saint-Eustache ; Il se nommoit René Benoist. -— (») la Sainte Veuve: La dame de Sainte-Beuve, cousine du chevalier d'Au­male.
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